05 février 2007

Caricatures: "Charlie Hebdo" en correctionnelle mercredi

PARIS (AP) - Le tribunal correctionnel de Paris examinera mercredi et jeudi les poursuites engagées par la Grande mosquée de Paris et l'Union des organisations islamiques de France (UOIF) contre "Charlie Hebdo" qui a publié en février 2006 des caricatures du prophète Mahomet, commandées initialement par le quotidien danois "Jyllands Posten".

L'hebdomadaire satirique sera jugé pour "injures publiques envers un groupe de personnes en raison de leur appartenance à une religion", un délit passible de six mois d'emprisonnement et 22.000 euros d'amende. La Grande Mosquée de Paris réclame 30.000 euros de dommages et intérêts à "Charlie Hebdo".

Peut-on se moquer de Dieu? Le sacré, la liberté d'expression et la laïcité ne sont pas en cause dans ce procès, selon le recteur de la Grande mosquée, Dalil Boubakeur. "C'est une affaire de caricatures qui incitent au racisme", insiste-t-il, se défendant à l'avance de tout intégrisme, "adversaire de l'Islam". Une religion où l'interdit de la représentation de Dieu et son prophète reste fort.

Trois mois après la publication de ces caricatures par le journal danois, de violentes manifestations ont éclaté dans le monde musulman, des centres culturels ou ambassades du Danemark étant mis à sac. Jacques Chirac devait condamner "les provocations manifestes susceptibles d'attiser dangereusement les passions" et pouvant blesser "les convictions religieuses".

Trois dessins sont en cause. La couverture du numéro du 8 février, réalisée par Cabu pour "Charlie Hebdo", représentant, sous le titre "Mahomet débordé par les intégristes", un prophète soupirant: "C'est dur d'être aimé par des cons".

Le deuxième représente le prophète coiffé d'un turban d'où sort la mèche d'une bombe et le troisième, Mahomet sur un nuage accueillant des terroristes leur disant: "Arrêtez, arrêtez, nous n'avons plus de vierges". Deux dessins initialement parus dans le "Jyllands Posten".

Pour les avocats de la Grande mosquée, si la "une" est une injure à l'ensemble de la communauté musulmane en la présentant comme une "communauté de 'cons'", les deux autres caricatures ne sont qu'une "assimilation outrageante" entre musulmans et terrorisme.

"L'Islam de France ne réclame pas que le délit de blasphème soit rétabli", plaide Me Francis Szpiner, l'un des avocats de la Grande mosquée de Paris et proche du chef de l'Etat. "Ce qui est en cause, c'est le racisme. Et le racisme n'est pas une opinion mais un délit", tranche l'avocat qui voit dans cette action judiciaire une "démarche républicaine".

Paradoxalement, "France-Soir", qui avait également reproduit les caricatures publiées par le "Jyllands Posten", n'est pas poursuivi, Dalil Boubakeur estimant que le quotidien était dans une "mission d'information en publiant des caricatures qui ne l'avaient pas encore été en France".

Une affirmation qui fait sursauter l'un des avocats de "Charlie Hebdo", Me Richard Malka. "S'il y a un endroit où il est légitime de publier des caricatures, c'est bien dans un journal satirique" qui, pour sa défense, invoquera le droit à l'humour, au blasphème.

Représentant d'un Islam modéré, la Grande mosquée de Paris explique avoir fait le choix de poursuites judiciaires pour éviter d'être débordée par plus radicale qu'elle. Ces poursuites sont destinées "à calmer et canaliser les mécontentements pour qu'il n'y ait pas de débordements", analyse Abdallak Zekri, président de la Fédération régionale du Sud-ouest de la Grande mosquée de Paris.

Si "Charlie Hebdo" était condamné, "ce serait la fin de toute possibilité de voir évoluer l'Islam vers un Islam de lumière", répond Me Malka.

L'hebdomadaire satirique entend faire citer 14 témoins, parmi lesquels François Hollande, secrétaire national du PS, ou encore François Bayrou, président de l'UDF et candidat à l'élection présidentielle. Leur venue, en pleine campagne électorale, est des plus hypothétiques.

L'écrivain bangladaise Taslima Nasreen, menacée de mort en 1994 par les islamistes radicaux à la suite de son premier roman, "La honte", devrait en revanche être présente.

La 17e chambre correctionnelle sera exceptionnellement présidée par Jean-Claude Magendie, président du tribunal de grande instance de Paris. Les débats débutent mercredi matin à 9h.

Poursuivis pour diffamation au Danemark, les caricaturistes ont été relaxés.


Espérons que cette farce se terminera bien pour Charlie Hebdo et la liberté de pensée. Sinon, le cas suivant sera le procès de ceux qui se moquent de l'homéopathie, une position qui choque les millions de croyants de cette ineptie pseudo-scientifique. A moins que ce ne soit celui de ceux qui dans leurs textes sacrés appellent au mépris et au massacre des 'mécréants' (les athées).

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